Question de Mme Zoé Genot à la secrétaire d'État à l'Asile et la Migration, à l'Intégration sociale et à la Lutte contre la pauvreté, adjointe à la ministre de la Justice, sur "les contrôles britanniques à la gare du Midi"

Chambre des représentants – Commission de l’Intérieur

Réunion du 5 juin 2013 – Extrait du compte rendu intégral (CRIV 53 – COM 0768)

10 Question de Mme Zoé Genot à la secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, à l’Intégration sociale et à la Lutte contre la pauvreté, adjointe à la ministre de la Justice, sur « les contrôles britanniques à la gare du Midi » (n° 17980)

10.01 Zoé Genot (Ecolo-Groen): Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, en réponse aux questions de deux de mes collègues en commission le 7 mai dernier, vous vous expliquiez sur les mesures prises pour lutter contre la pratique consistant à emprunter des trains Eurostar avec un billet pour Lillle et à aller jusqu’à Londres. Pouvez-vous m’expliquer pourquoi il serait souhaitable que ces contrôles soient effectués sur notre sol plutôt qu’en Grande-Bretagne ou à Lille, comme cela semblerait logique?

La presse s’est fait l’écho de la volonté d’Eurostar de desservir d’autres gares européennes. À chaque fois, il est question de contrôles effectués à Lille et non en Suisse, en Allemagne ou à Lyon. Pouvez-vous m’expliquer pourquoi la Belgique serait le seul État à consentir à des contrôles britanniques qui concernent des trains marquant des arrêts commerciaux en France avant d’atteindre Londres? Est-ce uniquement pour être agréable à la compagnie Eurostar? L’intérêt national belge y trouve-t-il son compte? Pouvez-vous m’indiquer sur quelle base légale les contrôles britanniques des voyageurs empruntant des trains à destination de Londres avec un arrêt commercial à Lille sont aujourd’hui effectués en gare du Midi?

Vous parlez, dans votre réponse, d’une limitation des places assises sur la liaison entre Bruxelles et Lille. Pouvez-vous m’indiquer quelle est la base légale de cette limitation? Est-elle du fait du gouvernement ou de la compagnie Eurostar?

Plus loin, vous faites mention d’une proposition de ladite compagnie pour renforcer la lutte contre les abus. On éprouve le plus grand mal à distinguer ce qui relève de l’action du gouvernement et ce qui relève des mesures prises par Eurostar. Qui fait quoi dans ce dossier? S’agissant de sujets aussi importants que la politique migratoire ou les contrôles effectués aux frontières nationales, une plus grande clarté me semble indispensable.

Plus précisément, madame la secrétaire d’État, j’avoue ma perplexité devant la mesure qui consiste à limiter le nombre de places assises en espérant ainsi limiter le nombre d’immigrants illégaux empruntant cette liaison ferroviaire. C’est une mesure qui découragera peut-être des voyageurs soumis à des impératifs professionnels ou familiaux, plus difficilement ces sans-papiers dont le seul motif de présence sur notre territoire serait d’atteindre la Grande-Bretagne. À moins que ce que vous appelez « limitation » ait été, en réalité, une suppression quasi complète de la possibilité d’emprunter cette liaison sans abonnement.

Pouvez-vous m’indiquer combien de places Bruxelles-Lille sont mises en vente par train? D’après mes informations, il est exceptionnel que l’accès à ces trains soit permis aux voyageurs sans abonnement. Est-ce exact? La question a son importance dans la mesure où l’on parle d’une infrastructure financée par le contribuable et d’un service assuré par une compagnie, certes privée, mais détenue en partie par la SNCB. De fait, les possibilités de voyager de nos citoyens se voient diminuées par cette mesure que vous mettez en avant dans votre réponse et qui paraît à la fois indirecte et disproportionnée. Si l’on poussait votre logique jusqu’au bout, il n’y aurait plus de liaison entre la Belgique et la Grande-Bretagne, ce qui serait, sans doute, d’une parfaite efficacité…

Envisagez-vous de cautionner, favoriser ou encourager d’autres restrictions de la possibilité de nos concitoyens de faire usage de nos infrastructures de transport dans le but de restreindre l’usage que pourraient en faire des immigrés clandestins cherchant à atteindre la Grande- Bretagne? Dans votre réponse vous parlez, sans plus de précision, d’une « solution structurelle ». Pouvez-vous m’indiquer ce que vous entendez par cette expression’? Quelles sont les voies explorées?

10.02 Maggie De Block, secrétaire d’État: Monsieur le président, madame Genot, jusqu’à aujourd’hui, le Royaume-Uni, la France et la Belgique sont les seuls pays concernés par la circulation par train haute vitesse empruntant le tunnel sous la Manche. Dans le futur, d’autres pays Schengen peuvent être concernés, tel l’Allemagne.

Pour faciliter cette circulation, mais aussi afin de combattre la migration illégale, les pays actuels favorisent le principe de faire tous les contrôles nécessaires avant le départ.

En 2004, la Belgique et le Royaume-Uni ont conclu un protocole d’accord bilatéral; il représentait la base du système de contrôle du Royaume-Uni en Belgique. Il faut affirmer que seuls les services d’immigration britanniques effectuent des contrôles sur le territoire belge, mais seulement sur l’identité. Les contrôles effectués par les autorités nationales sont bien transparents. À Bruxelles-Midi, la Belgique s’occupe du contrôle de sortie Schengen pour tous les voyageurs et le Royaume-Uni se charge des contrôles d’entrée britanniques, limités aux voyageurs en possession d’un ticket vers le Royaume-Uni.

Le système comporte des avantages importants pour les voyageurs en évitant des contrôles d’entrée complets lors de leur arrivée, qui leur feraient perdre beaucoup de temps.

Pour limiter le nombre de voyageurs illégaux, la société Eurostar a pris des mesures. Eurostar vérifie à bord, entre Lille et Calais, que tous les passagers sont bien en possession d’un ticket à destination du Royaume-Uni et qu’ils ont effectivement subi un contrôle d’entrée.

Dans le cas contraire, ils sont priés de sortir du train à l’arrêt Calais.

Les autorités belges et françaises entendent à nouveau étendre autant que possible la liaison ferroviaire Eurostar entre Bruxelles-Midi et Lille tout en luttant contre l’immigration illégale. Il est en effet de l’intérêt de nos deux pays de lutter contre ce phénomène. De son côté, le Royaume-Uni combat l’entrée clandestine de personnes qui tentent de se soustraire aux contrôles des services britanniques de l’immigration.

10.03 Zoé Genot (Ecolo-Groen): Madame la secrétaire d’État, dans la réponse que vous aviez donnée le 7 mai, vous parliez de la limitation des places assises. Aujourd’hui, vous parlez plutôt d’étendre le service entre Bruxelles et Lille. Si cette réponse, qui est à l’opposé de la première, est la bonne, je m’en réjouis car je pense que le train entre Bruxelles et Lille est un excellent moyen de transport. Il est toutefois paradoxal qu’en moins d’un mois d’intervalle, on dise le contraire.

Par ailleurs, vous n’avez pas répondu sur le nombre de places. Limite-t-on les places en fonction de la possession d’un abonnement ou pas? Qu’appelez-vous une solution structurelle? Je ne vois pas non plus très bien pourquoi la Grande-Bretagne travaille directement en Belgique alors qu’en France, cela ne se passe pas du tout comme cela.

10.04 Maggie De Block, secrétaire d’État: Je vous ai expliqué que c’était en vertu d’un accord datant de 2004.

10.05 Zoé Genot (Ecolo-Groen): La légalité de cet accord a été partiellement remise en cause. Cela me pose donc problème.

10.06 Maggie De Block, secrétaire d’État: Cet accord est tout à fait légal.