Ministre islandaise, suite : L'Oulipo. Mes impôts. La Nation. L'École. La crise.

… la suite…
Lettre ouverte à C.
C. est, comme moi, une exilée fiscale en Belgique.
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De : sebastian nowenstein <@gmail.com>
Date : 25 octobre 2015 07:44
Objet : impôts, oulipo, Islande, les pourcentages, la Grande mobilisation de l’École pour les valeurs de la République 40 % de perte de pouvoir d’achat
À :  C
Bonjour C,
J’espère que tu vas bien, ainsi que ta famille.
Je voulais te dire ceci : j’ai eu la surprise, il y a quelques jours, de voir que les Impôts avaient présenté à La Poste une demande de payement sur mon compte d’un montant inhabituellement élevé. Renseignement pris, il s’agissait d’une erreur : j’avais été taxé à 20 % sur mon salaire. Je me rappelle que nous avions comparé nos situations et que je m’étais étonné que tu payes beaucoup plus que moi qui, sans cette erreur, n’avais rien eu à payer lors des années précédentes en sus de ce qui est prélevé mensuellement. La Poste m’a facturé 12 euros, car elle n’a pas pu honorer la demande des Impôts, du fait que mon compte n’était pas assez approvisionné (je te donne ce détail qui paraîtra mesquin, mais 12 euros, c’est tout de même 12 euros).
Bref, je me demande si tu n’es pas, toi aussi, taxée à 20 % par erreur. Auquel cas, tu devrais demander remboursement pour les années écoulées…
À la décharge du fisc, les erreurs de pourcentage sont aussi courantes à l’étranger, même dans un pays hyperbranché comme l’Islande : la ministre des affaires sociales de ce pays nous a offert un vrai moment de bonheur oulipien, que je raconte dans mon blog : http://sebastiannowenstein.blog.lemonde.fr/des-idees-novatrices-nous-viennent-du-nord-pour-resoudre-la-crise-du-logement/
J’y vois aussi une forme de réplique atténuée de ce que fut la crise financière islandaise, qui coûta si cher aux contribuables européens lorsque, dans un certain nombre de nos pays, l’État se substitua aux banques islandaises défaillantes pour empêcher les déposants avides de beaux taux d’intérêt de perdre leur mise.
Côté européen, ce fut la naïveté invincible des épargnants qui les conduisit à faire confiance à des banques sur la seule base de leur glorieuse origine scandinave. Côté islandais, c’est plus compliqué. Mais l’amateurisme du gouvernement et la complaisance de la presse sont des éléments d’explication importants. On retrouve ces deux derniers éléments dans l’épisode de la performance de la ministre. Il est heureux, comme cela avait déjà été le cas lors des mois précédant l’effondrement du système financier du pays, que des Islandais, respect pour eux!, se soient interrogés. À l’époque de la crise, ces femmes et ces hommes extralucides n’avaient pas, hélas, été entendus. Je veux croire qu’aujourd’hui, le système d’alerte fonctionne mieux, mais n’en suis pas certain.
Des collègues de maths me disent vouloir utiliser la performance politico-pourcentuelle de la ministre pour imprimer à jamais dans l’esprit de leurs élèves comment on opère avec les pourcentages. Ce serait heureux.
Je propose aussi que, de concert avec nos collègues islandais et d’autres nations, nous agissions sur la base de la performance de la ministre pour que la jeunesse que la Nation nous confie connaisse à tout jamais les pourcentages et soit avertie de l’impéritie de certains gouvernements et du peu de pugnacité dont fait parfois montre la presse.
Alors qu’en cette période de Grande mobilisation de l’École pour les valeurs de la République, la Nation nous regarde, nous devons montrer que nous ne nous dérobons pas. Ajoutons une nouvelle charge sur nos épaules. Montrons que la baisse de 40 % (encore un taux à tomber en pâmoison, il provient de l’article que je t’envoie1) de notre pouvoir d’achat depuis 1981 n’entame pas notre dévouement.
Ainsi, non seulement nous aurons sauvé la République du terrorisme islamiste, mais nous aurons peut-être aussi, qui sait?, empêché la crise financière qui nous guette en formant des citoyens qui sauront garder leur calme face à des taux alléchants, ou s’interroger sur d’autres (-40 %) qui le sont moins.
La bise,
Seb.

Sebastián Nowenstein