A Lille, le jeudi 4 juin 2020.
Chère Madame,
Enseignant dans le secondaire, j’enquête sur l’affaire Mario Sandoval.
J’essaye de comprendre comment Sandoval est parvenu à enseigner dans des universités comme celles de Marne-la-Vallée ou Paris III. J’essaye également de comprendre comment différentes instances publiques ou officines privées ont réagi aux révélations concernant le passé argentin et les liens avec les AUC de Sandoval.
Mon enquête vise à constituer un dossier permettant d’aborder l’affaire Sandoval à l’école, en tant qu’objet d’étude qui, associant plusieurs disciplines, conduit à réfléchir sur des notions telles que les structures de pouvoir, le respect de la loi ou la violence politique et son acceptabilité sociale.
Cette enquête est publique et ses actes (des courriers, essentiellement, pour le moment) sont publiés sur mon blog. En ce sens, cette enquête voudrait être, outre son but pédagogique, une expérimentation et une réflexion sur ce qu’est, doit être ou pourrait être la délibération publique. C’est pourquoi, cette lettre est, aussi, publique. A la différence des pratiques habituelles du journalisme, que je ne critique pas, mais qui ne sauraient être les miennes, il s’agit ici de travailler uniquement avec une parole publique pesée, mûrie et assumée par ceux qui la délivrent, qui acceptent de la délivrer. Je ne cherche pas à recueillir des confidences que je devrais publier anonymement. Je travaille par écrit1.
Dans les activités déployées par Mario Sandoval au sein de l’IHEAL, il y en a une qu’il a effectuée en votre compagnie : la représentation de l’université de Paris III lors de la Conferencia Especial de Seguridad, qui s’est tenue au Mexique en 2003. J’ai demandé à madame Frein, personne responsable de l’accès aux documents administratifs au sein du Ministère de la Recherche, que me soient communiqués tous documents relatifs à cette mission (l’échange est consultable ici).
Quelle que soit l’issue de cette démarche, il serait à mon estime important que vous éclairiez, par vos remarques et commentaires, cet étrange épisode où l’IHEAL a été représenté à la fois par une chercheuse sérieuse telle que vous et par Sandoval. Je voudrais comprendre quel a été le mécanisme administratif qui a conduit la direction de votre institut à confier une telle mission à Mario Sandoval. Mais je voudrais aussi savoir comment vous regardez, aujourd’hui, avec la perspective du temps écoulé, cette situation improbable que vous avez connue.
Accepteriez-vous de me communiquer votre témoignage sur l’épisode évoqué et, plus généralement, votre sentiment sur l’affaire Sandoval ? Préférez-vous que je vous transmette les nombreuses questions que je me pose sur cet épisode ? Je crois comprendre que vous ne vous êtes pas exprimée publiquement sur l’affaire Sandoval : préférez-vous garder le silence ?
Bien cordialement,
Sebastián Nowenstein,
professeur agrégé.
1Il m’arrive cependant de m’écarter de ce principe, que je regarde comme un objectif plus que comme une contrainte à laquelle je devrais me soumettre de façon absolue.
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