Affaire Sandoval/Blanquer : requête devant le tribunal administratif contre le refus de l’administration de me transmettre des documents de nature à contribuer à la manifestation de la vérité.

Requête

Mario Sandoval est un ancien policier argentin qui a été extradé par la France vers son pays d’origine en 2019. Le 21 décembre 2022, Mario Sandoval a été condamné à 15 ans de prison pour l’enlèvement et la torture, en 1976, d’un étudiant de 24 ans, Hernan Abriata (voir Le Monde : https://www.lemonde.fr/international/article/2022/12/21/l-ex-policier-franco-argentin-mario-sandoval-condamne-a-quinze-ans-de-prison-par-un-tribunal-de-buenos-aires_6155324_3210.html).

Pendant 5 ans, entre 1999 et 2004, Mario Sandoval enseigna au sein de l’Institut des hautes Etudes de l’Amérique Latine (IHEAL) en tant que chargé de cours. Il y fut embauché par l’ancien ministre de l’Education Nationale, Jean-Michel Blanquer, directeur, à l’époque, de l’IHEAL, qui renouvela année après année son contrat.

Par la voix de sa direction, l’IHEAL a déploré a maintes reprises l’ombre dans son histoire que constitue le fait que Mario Sandoval ait fait partie de son personnel ; l’Institut s’est félicité de l’action de la justice et de l’extradition de son ancien chargé de cours et a appelé à ce que des investigations soient conduites afin que toute la lumière soit faite sur l’affaire Mario Sandoval (voir, par exemple, le communiqué de l’Institut après la condamnation de l’ancien policier : http://www.iheal.univ-paris3.fr/fr/actu/communiqu%C3%A9-0).

J’estime, pour ma part, que comprendre comment Mario Sandoval a pu travailler au sein de l’IHEAL est important, mais que comprendre comment les responsabilités d’avoir mis des jeunes esprits entre les mains d’un tel maître ont été ou n’ont pas été assumées l’est tout autant.

C’est dans cette double optique que j’ai demandé à la PRADA du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche communication d’un certain nombre de documents susceptibles, à mon estime, de contribuer à la manifestation de la vérité. Ma demande est jointe à cette requête.

Devant le refus implicite de l’administration de me communiquer lesdits documents, j’ai saisi la CADA, qui a émis un avis joint aussi à cette requête (voir lien supra).

L’avis de la CADA appelle un certain nombre de commentaires, que je formule dans ce qui suit.

Concernant le point 3 de ma demande, l’administration excipe de la destruction de la messagerie de monsieur Blanquer pour affirmer qu’elle serait dans l’impossibilité de me communiquer les documents demandés. Elle écrit, en effet, que lesdits documents n’existent plus, la messagerie de Monsieur BLANQUER n’ayant pas été conservée. Pourtant, une telle destruction, en l’absence plus que probable de tout accord préalable de l’administration des archives (voir ANNEXE I, l’avis donné, en application de l’article 40 à madame la procureure de Paris), tomberait sous le coup de l’article L214-3 du code du patrimoine. Si je dois présumer que l’administration est sincère dans ses déclarations, je dois aussi présumer qu’elle agit dans le cadre de la légalité.

Concernant le même point 3, j’observe que l’administration ne dit rien sur la messagerie carlos.quenan@sorbonne-nouvelle.fr et que, dès lors, c’est à tort que la CADA a déclaré sans objet ma demande pour ce qui est de cette dernière messagerie, dont on doit présumer qu’elle n’a pas été détruite.

Je note que l’avis de la CADA a été envoyé à l’université Paris III par mail le 7 novembre 2022. Cette dernière ne m’a pas transmis les documents demandés et n’a pas estimé opportun de prendre contact avec moi. Elle a, ainsi, manifesté sa volonté de ne pas me communiquer les documents demandés.

Le point 5 appelle les mêmes remarques que le point 3.

Il en va de même pour le point 6. Il faut cependant noter que la demande ne se limite pas au support que l’administration déclare détruit. Je précisais en effet explicitement que les demandes formulées dans ce point concernent tous les supports des documents demandés ou toutes les formes qu’ils pourraient revêtir, ce qui intègre, par exemple, les sms ou les messageries tant privés (whatsapp, telegram, signal ou autre) que publiques (tchap). Il faut, en effet, noter que l’article L300-2 du Code des relations entre le public et l’administration dispose que la nature de document public ne dépend pas de la forme et du support des documents produits ou reçus

Il est donc doublement manifeste que la destruction de la messagerie de monsieur Blanquer ne saurait justifier que la CADA ait déclaré sans objet ledit point 6.

Je demande à votre tribunal d’établir si les documents que j’ai demandés existent et, dans l’affirmative, d’ordonner qu’ils me soient communiqués.

ANNEXE.

Avis donné à la Procureure de Paris.

Madame la Procureure de Paris Laure Beccuau 

Tribunal de Paris 

Parvis du Tribunal de Paris 

75 859 PARIS Cedex 17 

A Lille, le 6 janvier 2023 

Par lettre recommandée. Transmission à madame la première ministre par la voie hiérarchique. Transmission à madame Azoulay, directrice de l’UNESCO. 

Publication à l’adresse https://sebastiannowenstein.org/2022/12/25/destruction-darchives-du-chef-du-cabinet-du-premier-ministre-je-saisis-la-procureure-de-paris/

Objet : destruction d’archives par l’administration 

Madame la Procureure, 

Le 9 avril 2022, je vous saisissais de la destruction systématique des messageries de personnels du ministère de l’intérieur sans les autorisations de l’administration des archives requises pour ce faire. 

Aujourd’hui, je reviens vers vous pour des faits à la fois plus précis et d’une gravité sans doute supérieure : la destruction de la messagerie de monsieur Sébastien GROS, chef de cabinet du premier ministre Valls. 

Dans un courriel en date du jeudi 15 décembre 2022, le service d’information du gouvernement, SIG, m’écrit que la messagerie de monsieur Gros n’a pas été conservée (ANNEXE VI). Dans un courriel du 2 janvier 2023, le SIG m’annonce qu’il n’existe pas d’accord préalable de l’administration des archives pour procéder à la destruction de la messagerie de monsieur GROS (ANNEXE VII). 

Point n’est besoin de rappeler ici, puisqu’on trouve plus bas les termes solennels de Déclaration universelle des Archives de l’Unesco (ANNEXE IV), la perte que représente pour la France la destruction de la messagerie d’un chef de cabinet de premier ministre. Si, en outre, la pratique est courante, voire banale, on doit craindre que des archives pareillement importantes et d’autres qui le paraîtraient moins disparaissent chaque jour, massivement. 

Les faits dont je vous donne avis aujourd’hui sont de même nature que ceux dont je vous saisissais le 9 avril 2022. La destruction d’archives sans autorisation préalable est toujours réprimée par l’article l’article L214-3 du code du patrimoine et les obligations que fait naître l’article 40 du code de procédure pénale dans le chef du fonctionnaire qui acquiert la connaissance d’un délit sont inchangées, de même que le sont les engagements internationaux de la France. Sur ces points je n’ai rien à ajouter à mon courrier du 9 avril 2022, que je reproduis plus bas. 

Bien qu’il faille présumer véridiques les déclarations de l’administration, il se pourrait, madame la Procureure, que l’on me trompe. Il se pourrait que la messagerie de monsieur GROS n’ait jamais été détruite mais que le SIG estime que le prétendre et s’en prévaloir est un expédient commode pour faire échec à la loi, aux obligations de communication de documents administratifs, en particulier, dont il lui déplairait de s’acquitter. Ce serait, alors, une infraction que l’article 432-1 du code pénal réprime. 

Il reste aussi que, impuni, l’argument fallacieux risque de faire naître le fait dont il excipe. Pourquoi ne pas détruire ces documents que l’on vous demande alors que la justice vous regarde sans réagir, comme indifférente, écrire de façon répétée que vous en avez détruit, ceux-là ou d’autres ? Régler le problème d’une fois pour toutes, ne pas (ne plus) avoir à mentir, se rendre service à soi-même et le rendre à ses successeurs, à l’administration, à l’État : ce serait presque une déloyauté que de ne pas détruire quand on le peut, quand le faire n’expose à nulle sanction, à nul danger. 

Et quand bien même ces archives ne seraient pas physiquement détruites, elles le seraient, de fait, une fois déclarées telles, pour ce qui est de leur consultation. Quiconque voudrait y accéder devrait d’abord, contraindre l’administration à confesser son mensonge initial. Comment espérer y parvenir ? Nombreux sont ceux qui y renoncent ; plus nombreux, sans doute, sont ceux qui, jugeant l’obstacle invincible, renoncent à essayer. 

C’est bien à une volonté de faire échec à la loi que l’on semble confronté. Mais il y a plus grave : c’est l’État de droit qui serait atteint, bafoué, défié si l’État lui-même s’abritait derrière une infraction qu’il dit avoir commise et s’il s’avérait qu’il se prévaut de cette infraction pour ne pas respecter le prescrit légal. 

Si la Justice laisse faire, elle sera regardée comme complice et il se créera l’apparence qu’elle s’égare. De grâce, madame la Procureure, agissez, vous qui êtes maître de l’opportunité des poursuites. 

Dans l’attente de votre réponse et dans celle d’une prompte réaction, je vous prie d’agréer, madame la Procureure, l’expression de mes salutations les plus respectueuses. 

Sebastian Nowenstein, professeur agrégé.

PS : Ministre de la justice, Robert Schuman cosigna le 3 août 1955 une circulaire interministérielle secrète destinée à refuser l’accès à la justice aux victimes de la répression par laquelle l’armée française combattait la rébellion algérienne. Cet acte fut découvert par l’historienne Claire Mauss-Copeaux grâce à des archives qu’on ne détruisit pas, mais que beaucoup, sans doute, auraient voulues détruites. Voir Des historiens soulignent l’emploi « systématique » de la torture par l’armée française en Algérie, Le Monde du 2 décembre 2000. Voir aussi Sylvie Thénault. Une drôle de justice; Les magistrats dans la guerre d’Algérie, qui donne les références du document : circulaire interministérielle du 3 août 1955, AN, BB18 4227*, note 20, La pérennisation du système.

Saisie de la Procureure de Paris du 9 avril 2022 par lettre recommandée. 

Sebastian Nowenstein 

XXXXX

XXXXXX

Belgique 

Courriel : s@ac-lille.fr 

Madame la Procureure de Paris Laure Beccuau 

Tribunal de Paris 

Parvis du Tribunal de Paris 

75 859 PARIS Cedex 17 

A Lille, le 9 avril 2022. 

Madame la Procureure, 

Je lis dans l’Avis 20214989 de la CADA (ANNEXE I) que le ministère de l’Intérieur détruit l’intégralité du contenu des messageries professionnelles des agents à l’occasion du départ de ces derniers :   

En réponse à une demande d’information complémentaire, il lui a par ailleurs été précisé qu’à l’occasion du départ d’un agent, quel qu’en soit le motif, sa messagerie professionnelle est supprimée, tout comme l’intégralité de son contenu. » 

Le ministère de la Culture, sous la tutelle duquel se trouve le Service interministériel des Archives de France, m’informe par message électronique en date du lundi 28 mars (ANNEXE II), qu’il n’a connaissance d’aucun document qui organiserait cette pratique :  

S’agissant du ministère de l’intérieur, le contrôle scientifique et technique est exercé par le chef de la mission des archives mis à disposition de ce ministère par le service interministériel des archives de France (article R. 212-4 du code du patrimoine). Ce dernier n’a connaissance d’aucun document, accord, circulaire ni instruction qui organiserait la destruction systématique des messageries au départ des agents. » 

Pourtant, comme le rappelle dans son message le ministère de la culture, aucun document administratif ne peut être détruit sans le visa de la personne chargée du contrôle scientifique et technique de l’État :  

L’article R. 212-14 du code du patrimoine précise que services, établissements et organismes publics soumettent la liste des documents qu’ils souhaitent éliminer au visa de la personne chargée du contrôle scientifique et technique de l’État sur leurs archives. Toute élimination est interdite sans ce visa. » 

Je remarque que par note (ANNEXE III) adressée au chef de cabinet du ministère de l’intérieur le 18 mai 2020, le délégué interministériel aux archives rappelait l’importance de préserver les messageries électroniques :  

Dans certaines conditions d’utilisation, et notamment dans le cadre des prises de décision ou dans celui de la diffusion d’information, les messageries deviennent en effet un support essentiel. « 

Le délégué précise :  

Chaque département ministériel a la responsabilité de définir, en accord avec le service interministériel des Archives de France, la stratégie, les modalités pratiques et les objectifs de la collecte et de l’élimination des messageries dans son périmètre.

Le délégué conclut :  

Il vous revient donc de veiller à élaborer cette stratégie en associant l’ensemble des services compétents (missions des Archives de France ou services d’archives ministériels, services informatiques, délégués à la protection des données, …). 

L’importance de préserver les archives est reconnue par la Déclaration universelle des Archives de l’Unesco, citée dans le Référentiel général de la gestion des archives(ANNEXE IV, page 6) :  

Comme le rappelle la déclaration universelle des archives adoptée en novembre 2011 par l’UNESCO, « parce qu’elles garantissent l’accès des citoyens à l’information administrative et le droit des peuples à connaître leur histoire, les archives sont essentielles à l’exercice de la démocratie, à la responsabilisation des pouvoirs publics et à la bonne gouvernance ». Parce qu’elles permettent à chaque citoyen d’exercer son droit « de demander compte à tout agent public de son administration », elles doivent être conservées de façon raisonnée et étudiée [➡ fiche n°2]. Le droit d’accès de tout citoyen [➡ fiche n°4], qui suppose pour l’administration la connaissance des règles du Code du patrimoine et de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978, est à ce titre crucial. « 

Enfin, je souhaiterais signaler la Fiche sur le délit de destruction d’archives publiques sans l’accord préalable de l’administration des archives du ministère de la Justice du 30 novembre 2020 (ANNEXE V), qui rappelle ce qu’il faut entendre par archives publiques :  

Les archives publiques sont définies par les articles L211-1 et L211-4du code du patrimoine (CdP) : il s’agit de l’ensemble des documents, y compris les données, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, produits ou reçus, dans l’exercice de leur activité, par toute personne morale de droit public ou toute personne de droit privé dans l’exercice d’une mission de service public.  »  

Je déduis de ce qui vient d’être exposé que l’élimination des messageries professionnelles dont s’est prévalu le ministère de l’intérieur dans le cadre de la procédure CADA susmentionnée tombe sous le coup de l’article L214-3 du code du patrimoine, qui punit d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende le fait, pour une personne détentrice d’archives publiques en raison de ses fonctions, de détourner ou soustraire tout ou partie de ces archives ou de les détruire sans accord préalable de l’administration des archives

En outre, le caractère systématique qui caractérise la destruction de ces messageries professionnelles paraît devoir tomber sous le coup de l’article 432-1 du code pénal, qui punit de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique, agissant dans l’exercice de ses fonctions, de prendre des mesures destinées à faire échec à l’exécution de la loi. 

Je porte à votre connaissance ces faits en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale.  

Sebastian Nowenstein, professeur agrégé.

ANNEXES  

ANNEXE I. Avis 20214989 de la CADA du 23/00/2021. 

https://www.cada.fr/20214989

Ministère de l’Intérieur  

Madame X, X, a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 28 juillet 2021, à la suite du refus opposé par le ministre de l’intérieur à sa demande de communication, par envoi électronique, sous format PDF ou tout autre format ouvert, après occultation des identités des personnes physiques évoquées, des courriels échangés entre les personnels du ministère de l’intérieur suivants, depuis leur adresse mail professionnelle, entre le 1er décembre 2018 et le 1er avril 2019 :  
1) Monsieur X (X), X et Monsieur X (X), X ;  
2) Monsieur X (X), X et Monsieur X (X), alors X.  
  
1. La Commission d’accès aux documents administratifs a demandé au ministère de l’intérieur de produire ses observations sur cette demande, qu’elle a transmise le 9 août 2021 à la personne responsable de l’accès aux documents administratifs et des questions relatives à la réutilisation des informations publiques (PRADA), désignée pour ce ministère conformément à l’article R330-2 du code des relations entre le public et l’administration et qui est, en cette qualité, notamment chargée, selon l’article R330-4 du même code de : « 1° Réceptionner les demandes d’accès aux documents administratifs et de licence de réutilisation des informations publiques ainsi que les éventuelles réclamations et de veiller à leur instruction ; / 2° Assurer la liaison entre l’autorité auprès de laquelle elle est désignée et la commission d’accès aux documents administratifs. »  
  
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le ministre de l’intérieur, par l’intermédiaire de la direction générale de la police nationale (DGPN), a maintenu son refus de communication des documents sollicités au point 2) de la demande, cette direction rappelant que le point 1) se situait en dehors de son domaine de compétence. Il est regrettable que, bien que la PRADA ministérielle ait été en copie du courriel de la DGPN, la commission n’ait reçu aucune réponse relative aux documents mentionnés au point 1), en dépit d’une relance.  
  
2. S’agissant du point 2) de la demande et de la messagerie de Monsieur X, la commission a été informée que ces documents, constitués de courriels échangés il y a plus de deux ans entre des fonctionnaires ayant depuis lors changé d’affectation, n’existent pas en l’état et ne peuvent être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. En réponse à une demande d’information complémentaire, il lui a par ailleurs été précisé qu’à l’occasion du départ d’un agent, quel qu’en soit le motif, sa messagerie professionnelle est supprimée, tout comme l’intégralité de son contenu. Or Monsieur X a changé de poste en 2019.  
  
Les termes des messages de la DGPN ne permettent pas à la commission de comprendre clairement s’il en est de même pour la messagerie de Monsieur X, qui a également quitté ses fonctions en 2019.   
  
La commission rappelle que ne relèvent du droit d’accès aux documents administratifs que les documents existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant.  
  
La commission prend acte des informations fournies par la DGPN et de ce que les courriels reçus ou envoyés par Monsieur X ont en l’espèce été détruits. Elle déclare dès lors, dans cette mesure, la demande d’avis sans objet, sous réserve toutefois que la suppression de la boîte mail concernée se soit par ailleurs accompagnée d’une suppression de toute sauvegarde qui aurait pu en être faite dans un fichier informatique ou sous format papier, et que la boîte mail de Monsieur X et son éventuelle sauvegarde aient également été supprimées, ce qui ne lui a pas été confirmé.   
  
3. S’agissant du point 1) de la demande, en l’absence d’information sur l’éventuelle suppression de la messagerie professionnelle de Monsieur X, après son départ X, non plus que sur celle de la messagerie de Monsieur X après son départ de ses fonctions de X ni sur celle de leurs éventuelles sauvegardes, la commission rappelle que les courriels professionnels sont des documents administratifs en principe communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve de la disjonction et de l’occultation des éléments couverts par les articles L311-5 et L311-6 du même code.   
  
La commission rappelle également qu’un traitement automatisé d’usage courant s’entend d’une opération qui ne présente pas de difficultés techniques particulières, c’est-à-dire qui se réalise à l’aide d’une fonctionnalité contenue dans le traitement et qui ne requiert donc pas un investissement technologique pour y parvenir (avis n° 20181269 du 13 septembre 2018, par exemple). Elle précise qu’il y a lieu de tenir compte de la charge de travail que le traitement de la demande implique pour l’administration (par analogie, s’agissant de documents administratifs susceptibles d’être établis par extraction des bases de données dont l’administration dispose : CE, 13 novembre 2020, n° 432832), ce qui suppose de procéder à une balance entre les moyens dont l’autorité saisie dispose et l’intérêt que présenterait, pour le demandeur, le fait de bénéficier de la communication des documents occultés eux-mêmes (CE, n° 426623, Association contre l’extension et les nuisances de l’aéroport de Lyon-St-Exupéry du 27 mars 2020, confirmé par CE 19 juin 2020, Syndicat mixte Haute-Saône numérique, n° 431293).  
  
En l’espèce, la commission estime que les documents sollicités sont communicables à la demanderesse, le cas échéant après occultation des éléments mentionnés aux articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve d’une part, que la messagerie professionnelle de Monsieur X, X (X), ou celle de Monsieur X (X), en sa qualité de X, ou leurs sauvegardes éventuelles, aient été conservées par l’administration, d’autre part, qu’un traitement automatisé d’usage courant permette techniquement d’en extraire les courriels sollicités. Aucun élément ne permet de penser en l’état actuel du dossier, compte tenu de la courte période en cause, que cette communication ferait peser sur le ministère une charge de travail excessive au regard des moyens dont il dispose.   
  
La commission émet, sous ces réserves, un avis favorable à la demande mentionnée au point 1).  

 ANNEXE II. Message du sous-directeur des affaires juridiques du ministère de la culture du lundi 28 mars.  

Bonjour Monsieur,   

Vous avez saisi nos services le 25 février 2022 d’une demande de communication de « tout document, accord, circulaire ou instruction » organisant la pratique de destruction, par le ministère de l’intérieur, de l’intégralité du contenu des messageries professionnelles de ses agents à l’occasion de leur départ.  

L’article R. 212-14 du code du patrimoine précise que services, établissements et organismes publics soumettent la liste des documents qu’ils souhaitent éliminer au visa de la personne chargée du contrôle scientifique et technique de l’Etat sur leurs archives. Toute élimination est interdite sans ce visa.   

S’agissant du ministère de l’intérieur, le contrôle scientifique et technique est exercé par le chef de la mission des archives mis à disposition de ce ministère par le service interministériel des archives de France (article R. 212-4 du code du patrimoine). Ce dernier n’a connaissance d’aucun document, accord, circulaire ni instruction qui organiserait la destruction systématique des messageries au départ des agents. Il travaille actuellement, conformément à la demande du délégué interministériel aux archives de France du 18 mai 2020 (voir PJ ci-jointe) à l’élaboration d’une stratégie de collecte des messageries.  

 Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées,   

Hugues GHENASSIA de FERRAN  

Sous-directeur des affaires juridiques  

  

De : sebastian.nowenstein <s>   
Envoyé : vendredi 25 février 2022 11:27  
À : bdl.cada <bdl.cada@culture.gouv.fr>  
Objet : demande de transmission de documents. Destruction des messageries des agents quittant le ministère de l’intérieur.  

   

Monsieur le ministre de la culture  
Secrétariat général  
Service des affaires juridiques et internationales  
Sous-direction des affaires juridiques  
A l’attention de Monsieur Hugues GHENASSIA-DE FERRAN  
182 rue Saint-Honoré  
75033 PARIS CEDEX 01   

   

A Lille, le 25 février 2022.

   

Monsieur le sous-directeur,   

Je lis dans l’Avis 20214989 de la CADA que le ministère de l’Intérieur détruit l’intégralité du contenu des messageries professionnelles des agents à l’occasion du départ de ces derniers :   

En réponse à une demande d’information complémentaire, il lui a par ailleurs été précisé qu’à l’occasion du départ d’un agent, quel qu’en soit le motif, sa messagerie professionnelle est supprimée, tout comme l’intégralité de son contenu.   

Je souhaiterais, en vertu de la loi de 78 sur la transparence, avoir communication de tout document, accord, circulaire ou instruction qui organise cette pratique. Je vous adresse cette demande car je présume que cette destruction se fait avec l’accord du Service interministériel des Archives de France, qui relève de votre ministère.  

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer mes salutations les meilleures,   

   

S. Nowenstein, professeur agrégé.   

Sebastián Nowenstein  

https://sebastiannowenstein.org/

 ANNEXE III. Note adressée au chef de cabinet du ministère de l’intérieur le 18 mai 2020 par le délégué interministériel aux archives.  

https://sebastiannowenstein.org/wp-content/uploads/2022/04/service-interministeriel-des-archives-au-chef-du-cabinet-du-ministre-de-linterieur-transmis-par-min-de-la-culture.pdf

 ANNEXE IV. Référentiel général de la gestion des archives.  

https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2014/07/r2ga_document_complet_201310.pdf

 ANNEXE V. Fiche sur le délit de destruction d’archives publiques sans l’accord préalable de l’administration des archives  

https://francearchives.fr/fr/circulaire/DGP_SIAF_2020_003

ANNEXE VI. Message de madame Durand-Viel. 

RE: demande de transmission de documents, courrier de SG à AM du 24 décembre 2014. 

Jeudi, Décembre 15, 2022 10h41 CET person DURAND-VIEL Laure laure.durand-viel@sgg.pm.gouv.fr Destinataire Nowenstein-Y-Piery Sebastian Copie à NATHAN Michael SIG RGPD POLLET Marie-alice 

Monsieur, 

en réponse à votre courriel du 13 décembre, vous trouverez ci-joint un document répondant au dernier point de votre demande. 

S’agissant des coordonnées professionnelles de M. Sébastien Gros, alors chef de cabinet du Premier ministre, nous ne disposons pas de document où elles figurent, mais conformément à la règle de nommage appliquée aux membres du cabinet, son adresse de courriel était sebastien.gros@pm.gouv.fr, et son adresse physique était à l’hôtel de Matignon, 57 rue de Varenne, 75007 PARIS. M. Gros ayant quitté ses fonctions depuis plusieurs années, ces coordonnées ne sont naturellement plus valables. 

Pour le reste, après recherches effectuées par notre service des archives, nous ne disposons pas de documents susceptibles de répondre aux autres points de votre demande, la messagerie de M. Gros n’ayant pas été conservée, et les recherches dans les documents en format papier n’ayant pas permis d’identifier de documents correspondant à vos demandes. 

Cordialement, 

Laure DURAND-VIEL 

Conseillère juridique auprès de la directrice, adjointe à la Secrétaire générale 

Secrétariat général du Gouvernement 

58 rue de Varenne, 75007 PARIS 

Tél : 01 42 75 59 38 

De : Nowenstein-Y-Piery Sebastian <sebastian-Andre.nowenstein@ac-lille.fr
Envoyé : mardi 13 décembre 2022 10:47 
À : SIG RGPD <rgpd.sig@pm.gouv.fr>; DURAND-VIEL Laure <laure.durand-viel@sgg.pm.gouv.fr
Objet : demande de transmission de documents, courrier de SG à AM du 24 décembre 2014. 

Demande de transmission de documents.   

À Lille, le 13 décembre 2022.  

Madame la Première ministre,  

Dans une lettre en date du 24 décembre 2014 (réf : CAB IV/4-CYM/ R018603.01.1, jointe à cette demande), le chef de cabinet du premier ministre Sébastien GROS écrivait à madame Armelle MABON :  

Vous avez appelé l’attention du Premier ministre sur vos travaux de recherche concernant la tragédie de Thiaroye, qui s’est déroulée le 1er décembre 1944 au Sénégal.  

Soyez assurée qu’il a été pris connaissance de vos réflexions.  

Je souhaite avoir communication : 

  • de tout document en rapport avec le courrier susmentionné.  
  • des documents préparatoires de la décision de répondre à madame MABON de la manière dont cela fut fait. 
  • de tout message envoyé ou reçu par la messagerie de monsieur GROS qui contiendrait l’un des mots suivants : Armelle, Mabon, Thiaroye.  
  • de tout répertoire ou organigramme où apparaitraient le nom de monsieur GROS et ses coordonnées professionnelles.  

Ces demandes sont effectuées en vertu des dispositions sur l’accès aux documents administratifs contenues dans le livre III du Code des relations entre le public et l’administration.  

A l’appui de mes demandes, je rappelle l’avis 20214989 délivré par la CADA. On y lit :     

(…) la commission rappelle que les courriels professionnels sont des documents administratifs en principe communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve de la disjonction et de l’occultation des éléments couverts par les articles L311-5 et L311-6 du même code.”     

Il me semble utile d’indiquer de façon explicite que les demandes formulées ici concernent tous les supports des documents sollicités ou toutes les formes qu’ils pourraient revêtir, ce qui intègre, par exemple, les sms ou les messageries tant privés (whatsapp, telegram, signal ou autre) que publiques (tchap).  Il faut, en effet, noter que l’article L300-2 du Code des relations entre le public et l’administration dispose que la nature de document public ne dépend pas de la forme et du support des documents produits ou reçus :     

Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission. »      

Je souhaite également rappeler, bien que cela soit sans doute superfétatoire, que l’article L214-3 du code du patrimoine punit d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende le  fait, pour une personne détentrice d’archives publiques en raison de ses fonctions, de détourner ou soustraire tout ou partie de ces archives ou de les détruire sans accord préalable de l’administration des archives.   

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie de croire, madame la première ministre, à l’expression de mes salutations respectueuses.   

S. Nowenstein, professeur agrégé. 

ANNEXE VII. Demande de communication de l’autorisation préalable de destruction de la messagerie de monsieur Sébastien GROS et réponse du SIG. 

RE: RE: demande de transmission de documents, courrier de SG à AM du 24 décembre 2014. 

Lundi, Janvier 02, 2023 17h40 CET 

DURAND-VIEL Laure laure.durand-viel@sgg.pm.gouv.fr 

Destinataire 

Nowenstein-Y-Piery Sebastian 

Copie à 

POLLET Marie-alice 

Monsieur, 

je regrette de vous indiquer qu’il n’existe pas de documents administratifs correspondant à votre demande. 

Cordialement, 

Laure DURAND-VIEL 

Conseillère juridique auprès de la directrice, adjointe à la Secrétaire générale 

Secrétariat général du Gouvernement 

58 rue de Varenne, 75007 PARIS 

Tél : 01 42 75 59 38 / 07 89 21 31 04 

De : Nowenstein-Y-Piery Sebastian <sebastian-Andre.nowenstein@ac-lille.fr
Envoyé : vendredi 16 décembre 2022 15:08 
À : DURAND-VIEL Laure <laure.durand-viel@sgg.pm.gouv.fr
Objet : Re: RE: demande de transmission de documents, courrier de SG à AM du 24 décembre 2014. 

Madame, 

Je vous remercie pour votre réponse.  

Je note que la messagerie de monsieur GROS a été détruite.  

Je souhaite avoir communication de  

  1. la décision de détruire la messagerie de monsieur GROS et des actes préparatoires de ladite décision,  
  2. l’accord préalable de l’administration des archives autorisant la destruction précitée,  
  3. de tout document organisant la destruction des messageries des personnels travaillant ou ayant travaillé au sein des services rattachés au premier ministre et  
  4. de tout document recensant les messageries de personnels ayant travaillé au sein des services rattachés au premier ministre qui auraient été détruites depuis 2014.  

Cordialement,  

S. Nowenstein, professeur agrégé.