Peut-on comparer les morts causés par le Hamas et ceux causés par Israël ?

J’ai vu à plusieurs reprises ces derniers jours des personnalités médiatiques déclarer qu’il ne fallait pas comparer les civils tués par le Hamas et ceux tués par Israël. Appelons cette thèse la thèse de la comparaison impossible (TCI, dans ce qui suit). L’argument qui la fonde est que le Hamas avait l’intention de tuer de civils, alors qu’Israël n’a pas cette intention.

Pourtant, des milliers de bombes sont tombées sur Gaza et des milliers d’enfants, d’adultes et de vieillards y meurent depuis l’attaque terroriste du Hamas contre Israël. Pourtant, le ministre de la Défense israélien Yoav Gallant a déclaré dès le 9 octobre que les Gazaouis sont des animaux humains, qu’Israël allait agir sur cette base et que Gaza allait être privée d’électricité, d’eau, de nourriture et de carburant.

Qu’Israël bombarde massivement Gaza est une information qu’Israël diffuse et qui ne peut pas être mise en doute. Les défenseurs de la thèse de la comparaison impossible expliquent que les morts palestiniennes sont regrettables, mais qu’elles sont la conséquence non voulue du fait qu’Israël se défend. Quand il y a la guerre, il y a des morts, c’est comme ça.

Les défenseurs de la TCI devraient à tout le moins répondre à trois remarques :

  1. Ce n’est pas parce qu’il y a une guerre qu’il n’y a pas de crimes de guerre. Si, du fait qu’il y a une guerre, on peut bombarder des civils par milliers, les priver d’eau et les affamer, la notion de crime de guerre n’a plus de sens. De même, ce n’est pas parce qu’il y a une guerre qu’il ne peut pas y avoir des crimes contre l’humanité ou un crime de génocide.
  2. Ce n’est pas parce qu’Israël affirme qu’il évite les morts civiles autant que possible que cela est vrai.
  3. Israël dispose de moyens militaires suffisants pour empêcher une nouvelle attaque du Hamas sans tuer des milliers de Gazaouis, tant il est vrai que le « succès » de l’opération macabre du Hamas, conduite avec des moyens militaires fort limités, s’explique en grande partie par les erreurs commises par l’appareil sécuritaire d’Israël, que l’État lui-même reconnaît.

Sans réponse satisfaisante, il faut revenir aux faits eux-mêmes, écarter la TCI et considérer l’hypothèse que les destructions et la mort semée à Gaza par Israël constituent des crimes comparables à ceux commis par le Hamas en Israël.

Ce résultat ne paraît pas, en lui-même, d’un grand intérêt. Ce qu’il faudrait essayer de comprendre, c’est comment il se fait que les défenseurs de la TCI parviennent à diffuser leur thèse avec autant de succès et si peu de contradiction, sur les plateaux de télévision notamment.