Courrier au premier ministre par la voie hiérarchique. IHEDN, Sandoval, conseillers militaires français en Argentine.

A Lille, le 25 décembre 2021

Monsieur Jean Castex, premier ministre

s/c du chef d’établissement

Monsieur le Premier Ministre,

Enseignant dans le secondaire, j’enquête sur l’affaire Sandoval, du nom de cet ancien policier argentin, qui acquit la nationalité française et qui, accusé de crimes contre l’humanité, fut extradé en décembre 2019 vers son pays d’origine.

Je vous écris afin de vous saisir du refus opposé par l’Institut des hautes Études de la Défense Nationale (IHEDN), sous votre tutelle, à ma demande de transmission de documents concernant les fonctions exercées par monsieur Sandoval au sein de cet établissement. Je vous prie de noter que ma demande a reçu un avis positif de la Commission d’Accès aux Documents administratifs (CADA, Avis n° 20214940 du 23 septembre 2021, ANNEXE I), avis que la direction de l’Institut choisit de méconnaître. Vous trouverez également en annexe à ce courrier les messages transmis au général Destremau, directeur de l’IHEDN -restés sans réponse (ANNEXE II)- et le courrier transmis au général Durieux, successeur du général Destremau à la tête de l’IHEDN, lui annonçant que je saisis son autorité de tutelle (ANNEXE III).

Je souhaite également vous saisir de l’occultation par l’ambassade de France en Argentine de l’accord passé entre les gouvernements des deux pays le 29 décembre 19701 en vertu duquel des militaires français ont conseillé leurs homologues argentins dans les années soixante-dix du vingtième siècle. Alors que la partie argentine reconnaît et publie officiellement cet accord, l’ambassade de France en occulte l’existence : elle publie une liste des accords conclus entre la France et l’Argentine qui le passe sous silence. Ce faisant, l’ambassade -et, par elle, la France- porte atteinte à l’établissement de la vérité historique et légitime ceux qui nient la réalité de la collaboration entre les armées française et argentine. On notera que les militaires argentins ont reconnu devant la caméra de Marie-Monique Robin combien leurs techniques de répression devaient à celles développées par la France en Indochine et, surtout, en Algérie.

Comme vous pourrez le constater plus bas (ANNEXE IV), j’ai écrit à l’ambassadrice de France en Argentine pour lui indiquer que la liste des accords que publie l’ambassade est incomplète. Vous pourrez aussi constater que, devant l’absence de réponse de l’ambassade, j’ai alerté le ministre des affaires étrangères de cette situation (ANNEXE V). Ces deux courriers, transmis par la voie hiérarchique, sont restés sans suite et, à ce jour, la liste diffusée par la France continue de passer sous silence l’existence de l’accord susmentionné.

En ce qui concerne l’affaire Sandoval, je vous demande

1. de bien vouloir instruire le général de corps d’armée Durieux pour qu’en conformité avec l’avis de la CADA, les documents demandés me soient communiqués et

2. de me transmettre, en vertu de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, tout document qui serait en votre possession portant sur la décision de l’IHEDN de ne pas donner suite à l’avis de la CADA mentionné plus haut.

En ce qui concerne l’accord par lequel la France mettait à la disposition de l’Argentine des assesseurs militaires, je vous demande de bien vouloir m’indiquer si vous endossez ou non la décision de madame l’ambassadrice de France en Argentine et du ministre des affaires extérieures de maintenir la publication et la diffusion via le site de l’ambassade de la liste qui occulte l’existence dudit accord.

Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, monsieur le premier Ministre, l’expression de mes salutations les meilleures.

S. Nowenstein,

professeur agrégé.

ANNEXE I

Avis positif de la CADA sur ma demande de transmission de documents :

Avis n° 20214940 du 23 septembre 2021

ANNEXE II

Messages adressés au général Destremau :

Affaire Sandoval : l’IHEDN choisit de méconnaître l’avis positif de la CADA à ma demande de transmission de documents.

ANNEXE III

Courrier adressé au général Durieux :

Refus de communiquer des documents : je saisis l’autorité de tutelle de l’IHEDN. Courrier au général Durieux.

ANNEXE IV

Courrier à madame l’ambassadrice :

Conseillers militaires français en Argentine. Lettre à l’ambassadrice de France en Argentine.

Annexe V

Courrier au ministre des affaires étrangères :

Conseillers militaires français en Argentine, une volonté de désinformer ? Lettre au ministre Le Drian par la voie hiérarchique.

1Accord modifiant l’accord du 11 février 1960 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République argentine concernant la mission d’assesseurs militaires français à la disposition de l’armée argentine.

On notera à titre subsidiaire que l’Accord mettant à la disposition de l’armée argentine une mission d’assesseurs militaires français, de 1960, ne figure pas non plus sur la liste diffusée par l’ambassade.