Lettre au président Kadyrov. Persécutions d'homosexuels en Tchétchénie.

À Bruxelles, le 11 mai 2017.

 
 
 
Monsieur le Président de la République tchtéchène,
Enseignant en France, je travaille dans le cadre de la discipline enseignement moral et civique sur la question des discriminations, ainsi que sur la problématique de la liberté de la presse.
Des informations parues récemment dans la presse m’ont conduit à m’intéresser aux persécutions dont les homosexuels hommes semblent faire l’objet dans votre pays ainsi qu’aux menaces proférées à l’encontre du journal Novaïa Gazeta, qui a informé sur lesdites persécutions.
Souhaitant préparer un dossier sur ces questions dans le but de lui donner la diffusion la plus large possible parmi mes collègues français et étrangers, je me permets de vous écrire afin de solliciter votre position sur les informations sus-mentionnées.
Plusieurs sources indiquent que les autorités de votre république ont affirmé qu’il n’y avait pas d’homosexuels en Tchétchénie et que dès lors ils ne pouvaient pas faire l’objet de poursuites, pour ensuite indiquer que s’il y avait des homosexuels, leurs familles les tueraient.
Le ministère des affaires étrangères français a vivement réprouvé ces affirmations dans un communiqué publié sur le site de l’ambassade de France en Russie :

Nous appelons la Fédération de Russie à condamner les réactions des autorités tchétchènes qui, en niant l’existence même de l’homosexualité ou en laissant entendre que les personnes concernées pourraient être tuées par leurs familles, encouragent un climat d’impunité. Toute la lumière doit être faite sur ces violations graves des droits de l’Homme, garantis par plusieurs instruments internationaux auxquels la Russie a librement souscrit.1

Pourriez-vous m’indiquer si vous maintenez l’affirmation qu’il n’y pas d’homosexualité en Tchétchénie ? Dans l’affirmative, pourriez-vous m’indiquer sur quelles études ou quelle documentation vous vous fondez pour étayer votre position ?
J’observe cependant que vos porte-paroles envisagent la possibilité qu’il y ait des homosexuels dans votre pays et déclarent que, dans cette hypothèse, ils seraient tués par leurs familles. Étant donné que la Constitution de la Fédération de Russie s’applique dans votre République et que celle-ci protège la vie humaine et la liberté, pourriez-vous m’indiquer quelles mesures vous avez prises pour éviter que les homosexuels soient assassinés ?
À ma connaissance, les propos menaçants de vos porte-paroles n’ont pas fait l’objet de sanctions. Faut-il en déduire que vous les approuvez ?
Par ailleurs, des menaces sérieuses ont été proférées contre les journalistes de Novaïa Gazeta dans votre territoire, notamment à la suite d’un rassemblement de 15000 personnes2. Pourriez-vous m’indiquer si ces menaces ont fait l’objet de poursuites et si vous avez pris des mesures afin de garantir la sécurité des journalistes qui travaillent dans votre République ?
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie de croire, monsieur le Président, à l’expression de mes salutations distinguées.
Sebastián Nowenstein,
professeur agrégé

1https://ru.ambafrance.org/Droits-de-l-Homme-Situation-des-personnes-LGBTI-en-Tchetchenie

2http://www.telerama.fr/monde/meurtres-d-homosexuels-en-russie-etre-gay-en-tchetchenie-c-est-deja-etre-en-danger-de-mort,156714.php