Affaire Blanquer/Sandoval : courrier à la ministre Retailleau demandant la constitution d’une commission d’enquête.

À Bruxelles, le 14 février 2023

Envoyé le 14 février 2023

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Madame Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

sous couvert du chef d’établissement

copie au président de l’université Paris III-Sorbonne Nouvelle et aux membres du conseil d’administration de ladite université

Madame la Ministre,

En décembre 2022, Mario Sandoval, ancien chargé de cours à Paris III et ancien policier argentin, était condamné dans son pays d’origine à 15 ans de prison pour l’enlèvement et la torture, en 1976, d’un étudiant de 24 ans, Hernan Abriata (Le Monde). Selon un article du Monde diplomatique de 2007, Mario Sandoval a conseillé les Autodéfenses unies de Colombie (AUC), un groupe paramilitaire colombien responsable de crimes sans nombre qui se finançait notamment par l’exportation de cocaïne vers l’Europe.

Entre 1999 et 2004, Mario Sandoval fut embauché et réembauché à l’IHEAL (Institut des hautes Études sur l’Amérique Latine, rattaché à Paris III) par l’ancien ministre Jean-Michel Blanquer, qui, à l’époque, dirigeait cet institut. C’est pendant cette période, en parallèle avec ses activités d’enseignement exercées au sein de l’université, que Mario Sandoval aurait conseillé les AUC.

Succédant à monsieur Blanquer à la présidence de l’IHEAL, madame Zagefka mit un terme aux fonctions de monsieur Sandoval. Depuis, toutes les directions dudit institut se sont exprimées pour manifester leur désarroi et tristesse que monsieur Sandoval ait pu travailler au sein de l’Institut et, après la condamnation de l’ancien tortionnaire, pour se féliciter que justice ait été rendue.

Si la position de l’IHEAL est, depuis la fin du mandat de monsieur Blanquer, sans ambiguïté, tel n’est pas le cas de l’université de Paris III-Sorbonne Nouvelle, qui, à ma connaissance, ne s’est jamais exprimée sur le sujet et qui, surtout, refuse de me communiquer des documents utiles à la manifestation de la vérité pour lesquels la CADA, Commission d’Accès aux Documents administratifs, a émis un avis favorable. L’Université n’a pas estimé devoir justifier son refus, ce qui m’a conduit à en saisir le Tribunal administratif.

Madame la Ministre, l’Université n’est pas une administration ordinaire. Elle a pour mission de contribuer à la construction de la connaissance. C’est pourtant à son occultation que Paris III-Sorbonne Nouvelle semble œuvrer dans l’affaire Sandoval/Blanquer. L’Université a aussi mission de former de jeunes esprits. Pourtant, nulle responsabilité n’a été assumée par Paris III pour avoir confié à monsieur Sandoval ses étudiants et aucun regret public n’a été exprimé à ces derniers par ceux qui leur choisirent un tel maître.

Des actes sont aujourd’hui indispensables et urgents, madame la ministre :

  1. Toute la lumière doit être faite sur les conditions dans lesquelles Mario Sandoval a été embauché et maintenu en poste. Les responsabilités doivent en être clairement et publiquement établies et assumées.
  2. À cette fin, je vous suggère respectueusement d’instituer une commission d’enquête dotée du pouvoir d’accéder à l’ensemble des archives en la possession de Paris III et de celui d’interroger les agents Jean-Michel BLANQUER et Carlos QUENAN, responsables de l’embauche de monsieur Sandoval et de son maintien en fonctions pendant cinq ans. Ceux qui, étrangers à cette décision, mais disposant d’informations susceptibles d’éclairer les tenants et les aboutissants de ladite décision doivent aussi être entendus.
  3. Si des faits non prescrits et constitutifs de fautes professionnelles venaient à être dévoilés, les procédures disciplinaires appropriées devraient être mises en place.
  4. Des regrets doivent être exprimés à celles et ceux qui, se rendant dans l’université de Paris III-Sorbonne Nouvelle pour se former, ont été confiés à Mario Sandoval. Une publicité suffisante doit être donnée à l’expression de ces regrets.
  5. Dans le respect des dispositions du Code des relations entre le public et l’administration, tous les documents administratifs utiles à la bonne compréhension de cette affaire doivent être rendus publics.

Certain que vous prendrez les mesures qui s’imposent, je vous prie d’agréer, madame la ministre, l’expression de mes salutations les meilleures.

S. Nowenstein, professeur agrégé.