Logiciel d'aide à la correction et à la rédaction. Projet SAMAN.

Projet SAMAN, proposition de collaboration.

  1. Développement de logiciels d’aide à la correction et à la rédaction.
  2. Mise en place d’un corpus numérisé de textes permettant de mettre en évidence les difficultés d’expression en langue maternelle et en langue étrangère.
  3. Écriture d’un roman collaboratif de science-fiction.
  4. Évaluation quantitative de projets.

1. Développement de logiciels d’aide à la correction et à la rédaction en langue étrangère.
Un logiciel d’aide à la correction, à l’auto-correction et à l‘apprentissage.
Il s’agit de développer un outil permettant à l’enseignant de proposer des corrections utiles à l’acquisition de la langue. L’outil permettra de classer les erreurs en fonction de leur fréquence et de leur nature grammaticale ; il proposera des voies de remédiation. Cet outil est semi-automatique : c’est toujours l’enseignant qui corrige, le logiciel facilite la visualisation et l’explicitation des erreurs. Une fois les pratiques et la réflexion nécessaires à opérer ce logiciel acquises, il devient aussi un logiciel d’auto-correction et, in fine, un logiciel d’apprentissage.
Le logiciel doit permettre de procéder à une correction par paliers : il ne s’agit pas de partir du travail de l’élève pour lui retourner immédiatement un résultat final impeccable, mais de parcourir avec lui l’ensemble des étapes qui progressivement le conduiront à un bon résultat1. L’enseignant doit avoir à sa disposition des modules grammaticaux adaptés ou adaptables aux possibilités et caractéristiques des élèves.
J’ajoute que ce logiciel peut être aussi opéré par un correspondant espagnol dûment formé pour aider un élève français.
-Un logiciel d’aide à la rédaction.
Nous développerons un outil qui intégrera les ressources qu’Internet met à la disposition de l’apprenant et qui lui permettent notamment de tester statistiquement la correction d’un énoncé. Le logiciel identifierait, dans un énoncé donné, les suites de mots2 non représentées dans un ou plusieurs corpus de référence. Ces corpus présenteraient des caractéristiques et des niveaux de fiabilité différents : on pourrait chercher dans l’ensemble des sites hébergés dans un pays -l’Espagne, disons-, dans un site donné -elpais.com, un site contenant la législation espagnole, …-. Dans sa version la plus simple, le logiciel ne ferait que rentrer une suite de mots entre guillemets dans Google avec la contrainte de chercher uniquement dans des sites en espagnol, ou dans un site donné (commande « site:elpais.com »). Il est évident qu’au delà d’un certain nombre de mots toute suite est inexistante, il est évident aussi que des énoncés courts mais corrects peuvent ne pas exister dans un corpus… L’outil peut donner des faux négatifs, mais il peut aussi donner la certitude que la suite de mots que l’on a choisie est juste. Le logiciel devrait donner surtout des résultats présentant des similitudes avec l’énoncé rentré. Il faudrait doubler cet outil d’un correcteur traditionnel qui identifierait les erreurs les plus fréquentes.
L’ensemble des requêtes constitue un corpus sur lequel des recherches sur l’expression en langue étrangère et maternelle peuvent être effectuées3.
Ce logiciel est une aide pour l’apprenant, mais aussi une contrainte puisqu’il est obligé de trouver une réponse aux interrogations et alertes que suscite l’analyse de la distance statistique de son texte par rapport à un corpus de référence.
2. Mise en place d’un corpus numérisé de textes permettant de mettre en évidence les difficultés d’expression en langue maternelle et étrangère.
On peut considérer que le travail de correction d’une production écrite s’apparente à celui qui permet de constituer un corpus en linguistique. Le logiciel d’aide à la correction proposé plus haut doit faciliter la mise en place de procédures de correction normalisées4 et autoriser ainsi un traitement automatique d’un volume important de travaux5. On pourra dès lors constituer un corpus susceptible de rendre visibles les erreurs les plus fréquentes, de rechercher des problèmes d’expression de façon horizontale, dans les productions effectuées en différentes langues et dans des contextes variés. Voir aussi le paragraphe suivant.
3. Écriture d’un roman collaboratif de science-fiction.
Ce travail vise des objectifs différents mais en grande partie complémentaires. J’explique la démarche de base et formule ensuite quelques commentaires.
Chaque participant invente un personnage et le fait interagir avec les personnages des autres participants. Chacun est libre de s’approprier comme il l’entend la matière élaborée par les autres participants pour l’intégrer dans sa propre histoire. Chacun écrit donc une histoire composée de sa propre production et de l’adaptation libre qu’il fait de la production des autres participants. Il y a par conséquent autant de romans que de participants.
Afin de susciter des convergences entre les histoires, on impose des contraintes -qu’on appelle « attracteurs »- et que toutes les histoires doivent intégrer. Dans le cadre de ce qui est proposé ici, ce sont des projets scientifiques de recherche qui constituent les attracteurs. Les participants doivent pouvoir rencontrer des chercheurs, lesquels interviennent en tant qu’experts ou conseillers techniques6. Afin de faciliter ces rencontres, nous nous limiterons à des chercheurs travaillant dans la métropole lilloise.
Quel intérêt pour l’école, pour les chercheurs et pour nos élèves?
Constitution d’un corpus. S’inscrire dans le temps long. Quelques commentaires sur ces questions:
-Intérêt pour les chercheurs.
L’intérêt pour les chercheurs réside dans la possibilité de voir leurs idées interrogées avec des perspectives inhabituelles. Et si les chercheurs inventaient aussi des histoires, avec nos élèves ou de leur côté ? N’y a-t-il pas là un gisement de sérendipité et de créativité scientifiques ?
Je fais le pari que poser sur une recherche le regard du créateur de fiction est une opération utile. Elle sera, à tout le moins, source d’amusement…
-Intérêt pour l’école et les élèves.
Le premier intérêt est linguistique. Il semble que les progrès dans l’acquisition d’une langue étrangère soient corrélés avec l’intensité de l’immersion dans une situation de communication dont la langue étrangère est le vecteur. Nous formulons l’hypothèse que l’invention d’une fiction est un moyen efficace de se rapprocher d’une situation d’immersion. De surcroît, notre dispositif peut aisément faire l’objet d’une collaboration entre élèves de nationalité et langue différente ; nos « romans » peuvent comporter des textes en différentes langues.
Nous pensons de même que la pratique intense et contrôlée de la fiction est un excellent moyen de progresser en français.
Le deuxième intérêt de notre démarche est plus vaste. Il naît de la préoccupation de voir nos jeunes livrer leur vie personnelle sur Facebook. Cette entreprise vend ensuite les informations gratuitement fournies par nos élèves. Nous proposons de substituer à ce réseau qui exige la vérité et monnaye les intimités, un réseau gratuit qui propose des fictions. Certes, nous ne sommes pas certains de faire plier Facebook, mais il faut au moins que la possibilité existe d’échapper à ses rets et de dédaigner l’embrigadement qu’elle propose à notre jeunesse. Des fictions, donc, en lieu et place de sa vie et de son intimité, pour nourrir le réseau
Troisièmement, nous aspirons à suivre nos élèves sur le long terme grâce à une procédure nuancée, normalisée, bienveillante, transparente et respectueuse. Notre démarche est nuancée parce qu’elle nous permet de voir dans la durée le travail de l’élève sans le réductionnisme inhérent au remarques de quelques mots d’un carnet scolaire. La normalisation est celle de la consigne, simple et constante : écrire une histoire. La bienveillance provient du fait que, même si les travaux ponctuels peuvent et doivent être notés, ce ne sera pas le cas de l’ensemble de la production de l’élève7. La transparence et le respect découlent de l’assurance que l’utilisation du corpus constitué pendant sa scolarité par l’élève se fera avec le consentement de celui-ci et de sa famille8.
-Constitution d’un corpus.
Nous nous donnons pour objectif de susciter le volume le plus important possible de documents convenablement annotés afin de pouvoir les interroger avec des outils numériques. Le dispositif d’écriture dont il est question ici nous paraît de nature à donner naissance à des documents dans des conditions relativement contrôlables. Nous pensons, par ailleurs, que, convenablement développé, notre logiciel devrait permettre la correction des travaux entre pairs (entre étudiants) de différentes langues maternelles.
Faut-il un temps infini pour constituer ce corpus ?
Nous devons corriger moins, en volume. Nous sommes nombreux à avoir le sentiment que nos corrections ne servent à rien, ou à pas grand-chose. Nous passons des heures à corriger des copies et nous savons que fort peu nombreux seront les élèves qui prolongeront notre travail en réfléchissant sur les erreurs commises. Mais nous pouvons corriger mieux. Ce dispositif doit, d’abord, accroître la qualité des travaux qui nous sont rendus. Il y aura moins de corrections, mais chacune des corrections devra être le départ d’une réflexion visant un apprentissage. Un devoir sert à classer les élèves et à leur donner des notes, c’est la fonction de tri de l’école, mais il doit aussi être à l’origine d’apprentissages nouveaux. Corriger moins pour corriger mieux, c’est parvenir à un équilibre qui met à l’honneur, pour ainsi dire, la fonction pédagogique de la correction.
Des modalités concrètes de mise en place de ces propositions seront proposées dans un autre document.
4. Évaluation des projets.
Nous estimons que ce genre d’initiative doit faire autant que possible l’objet d’une évaluation quantitative. Le Clersé (Centre Lillois d’Études et de Recherches Sociologiques et Économiques) a mis en place des procédures pour étudier la perception que les étudiants inscrits en première année universitaire d’études scientifiques ont de la science. Leurs outils devraient pouvoir être adaptés pour analyser les retombées des démarches ici proposées. On devra par exemple se demander si la perception de la science par un groupe d’étudiants ayant pratiqué la science-fiction diffère de celle d’un groupe témoin.

1On peut se donner comme base de départ un logiciel de gestion des versions : http://fr.wikipedia.org/wiki/Logiciel_de_gestion_de_versions

2Peut-on imaginer un logiciel qui lance des recherches au fur et à mesure qu’on écrit et qui nous alerterait de la non existence dans un corpus donné de telle ou telle suite de mots ?

3Les Systèmes à base de trace pour l’apprentissage humain peuvent fournir un cadre théorique à cette démarche : http://events.it-sudparis.eu/rjc_eiah2006/proceeding/Article15.pdf

4L’existence de procédures normalisées de correction n’empêche pas l’enseignant de singulariser une copie ou d’ajouter les commentaires qu’il souhaite. Il s’agit seulement de se donner les moyens de rendre la copie accessible à des tiers (des collègues) et de rendre visibles des difficultés qui se manifesteraient dans plusieurs disciplines.

5La mise en place d’une base de données numérisée et nominative pose des problèmes éthiques et légaux. Il faudra prendre des dispositions strictes pour protéger de façon exigeante les intérêts de l’élèves. On peut imaginer, par exemple, que toute consultation de cette base soit soumise à l’autorisation de l’élève et de ses responsables légaux.

6Imaginons, pour fixer les idées, une modalité concrète de mise en place de ces attracteurs. Cinq établissements scolaires suivent le travail d’autant de laboratoires de la région lilloise. Ils publient un blog rendant compte de ce suivi : vidéos, interviews, bibliographie, etc. Ces blogs sont les attracteurs. Le but de ce projet est de mettre en place une démarche qui dure sur plusieurs années, il faut donc associer les collèges de notre bassin à la démarche, voire les écoles primaires. Mais on cherchera aussi à intéresser des établissements universitaires de notre région : suivre un laboratoire de recherche pendant un an est une activité tout à fait honorable pour des étudiants universitaires.

7Nous pensons qu’il est important de ménager des espaces de travail qui échappent à la fonction de tri de l’école. Nous avons besoin d’espaces protégés où élève et professeur collaborent uniquement à d’obtenir le meilleur résultat possible sans la contrainte de la note.

8On insistera sur le contraste entre notre déontologie à l’absence de scrupules de Facebook. Montrer un traitement respectueux des données est une façon de questionner le consentement supposé et, de fait, imposé, qui prédomine dans la façon dont les données de l’internaute sont habituellement traitées.