Le blob et la kenningar : des Islandais à la barre.

À Timburbrou, le 12 mars 2022.

Les chroniques judiciaires de G. Alakalth.

Le détour islandais du procès du physarum polycephalum.

Pendant deux siècles, il s’écrivit en Islande, en prose, autant que dans le reste de l’Europe. Le fleuron de cette production, ce sont les sagas. De nombreuses théories se sont succédé qui ont voulu expliquer l’origine de ce genre littéraire. L’une d’elles veut que les sagas soient nées pour expliquer les poèmes scaldiques. Les scaldes étaient des poètes qui, dans la Scandinavie médiévale chantaient les louanges de seigneurs suffisamment puissants pour les récompenser en leur offrant des cadeaux de prix. La poésie médiévale islandaise, la poésie scaldique, comme on dit, présente la particularité d’être d’une folle complexité. Elle est fondée sur des métaphores qui s’enchâssent, les fameuses kenningar. La mer, c’est le pré de la mouette, le bateau est le cheval de la mer. Le bateau sera, par conséquent, le cheval du pré de la mouette. Nous avons donné là ce que Borges appelait une équation de second degré, le niveau d’enchâssement le plus simple. Mais l’opération peut se répéter, ce qui rend le résultat final difficilement compréhensible pour le non-spécialiste. On aurait donc écrit les sagas pour rendre compte de ces poèmes abscons, pour en expliquer le sens. On aurait crée des mondes de fiction -plus ou moins proches de la réalité- autour de ces poèmes. Telles ont été les explications données à la cour par Einar Federico Jónsson, professeur de littérature islandaise à Paris IV.

Puis, vint le tour de Helga Alexandersdóttir, une geek qui nous a montré un autre visage de l’Islande, celui d’un pays féru de nouvelle technologies et de jeux vidéos et qui, pourtant n’hésite pas à piocher dans son passé médiéval prestigieux : le jeux Egill, explique Helga Alexandersdóttir, suit plusieurs poètes et guerriers viking qui vont de cour en cour chantant les louanges des seigneurs chez qui il séjournent. En paiement de leurs services, ils obtiennent des anneaux d’or. Les joueurs suivent les différents poètes qui parfois s’affrontent en joutes poétiques ou… à l’épée, en des duels et combats.

Au jour d’aujourd’hui, il semble :
1. Que les élèves aient détourné des échantillons de Physarum polycéphalum.
2. Qu’ils aient mis en place des combats entre blobs génétiquement modifiés et que sur lesdits combats aient été pariées des sommes considérables.
3. Qu’ils aient piraté le jeu Egill : au lieu de chanter les louanges d’un guerrier, on chanterait les louanges de différents blobs qui se battent entre eux.
4. Que les poètes aient été rémunérés par les propriétaires des blobs.
5. Ou que les poètes aient payé les entraîneurs des blobs.
6. Que les combats entre blobs aient été précédés de joutes poétiques.
7. Que ces joutes aient filmées et diffusées dans les circuits des slameurs.
8. Qu’un divertissement complexe se soit mis en place, qui mêlait slam, manipulations du vivant et argent.
Les auditions continueront demain.