À Bruxelles, le 18 février 2023
Madame, Monsieur,
Enseignant dans le secondaire et le supérieur, je travaille sur la question du off en politique. J’ai, naturellement, été très intéressé par votre article 1er février 2023 au sujet de la polémique -appelons-la ainsi- du déjeuner du président. Le travail sur le off que je mets en place s’inscrit dans une démarche plus large, qui consiste à revenir sur des informations qui, noyées dans le flux médiatique, semblent, au bout d’un temps plus ou moins court, se diluer ou disparaître.
Vous écrivez ceci :
Il est d’autant plus aisé pour ces éditocrates d’écarter toute remise en cause qu’ils détiennent le monopole de la parole, et peuvent se dispenser de la moindre argumentation, au profit de l’invective et de l’injure, en toute bonne conscience. »
L’École peut-elle créer les conditions pour que, en lieu et place de la polémique, se déroule cette discussion argumentée que vous estimez impossible dans l’espace médiatique ? Je soumets à des journalistes, à leurs syndicats, à des chercheurs un ensemble de questions que vous pouvez consulter ici. Ce faisant, je cherche à mettre à la disposition de mes élèves et étudiants un ensemble de textes exposant les positions des uns et des autres. Je souhaiterais aussi que la démarche proposée favorise l’émergence d’une discussion argumentée. Enseignants, nous avons pour mission de transmettre à nos élèves les exigences de cette façon de débattre, mais il me semble non moins important de se demander par quelles contraintes on peut la faire advenir. Je fais le pari que se soumettre aux règles de l’École et s’exprimer au bénéfice d’étudiants et élèves sont des activités qui favoriseront le recours à l’argumentation rationnelle. Dans le cadre de cette démarche, monsieur Aphatie s’interdira sans doute de qualifier de couillonnade la polémique, madame Elkrief expliquera pourquoi ladite polémique est stupide et tous deux montreront en quoi la critique est complotiste plutôt que de se contenter de l’affirmer (je commente leurs procédés argumentatifs ici). Et peut-être pourrez-vous, sans rien enlever à la force de votre analyse, étayer votre affirmation selon laquelle les éditocrates détiennent le monopole de la parole ?
Au moment où je vous écris, Stephane Vernay (l’un des commensaux du président), d’Ouest-France, Gilles Van Kote, du Monde et Laurent Villette, de la CFDT, ont répondu à mes messages et se montrent disposés à dialoguer avec mes élèves et étudiants.
Accepteriez-vous de répondre à certaines des questions que je vous soumets ? Elles sont nombreuses et il y en a parmi elles qui ne vous concernent pas : n’hésitez pas à choisir celles qui vous paraîtront les plus pertinentes ou, si vous le souhaitez, à les reformuler. Rendre publiques ces questions et les diffuser est une manière, à mon estime, de créer un espace public de discussion et de promouvoir une convergence des argumentations autour des questions posées qui, idéalement, favorisera la confrontation rationnelle des positions des uns et des autres.
Accepteriez-vous de dialoguer avec des élèves ou des étudiants sur le off en politique et, plus spécifiquement, sur la polémique du déjeuner du président ?
Je vous écris publiquement, vous pouvez le constater ici. Je le fais car je souhaite que les démarches que je mets en place dans cette initiative soient accessibles à chacun. Je le fais aussi parce que ce courrier s’inscrit dans l’espace de discussion que, pour ainsi dire, votre article crée autour de lui.
Bien à vous,
Sebastian Nowenstein, professeur agrégé.