La fresque. De l’atelier de Timburbrou. Une préface.

Les hyperliens que l’on trouvera dans ce texte sont un ajout de l’éditeur ; ils ne figurent pas dans l’édition initiale et n’ont pas reçu l’approbation de l’auteur ou des auteurs. Ces liens ne figurent que dans la version numérique du document.

Ce texte, qui est la production de l’atelier de Timburbrou la plus ancienne dont nous ayons connaissance, fut rédigé dans le cadre de la création d’un réseau de personnages. Dans un réseau de personnages, les participants inventent un personnage et lui donnent vie. Chaque participant peut s’emparer des personnages des autres comme il l’entend, puisqu’il n’y a pas de droit d’auteur. Chaque participant à l’initiative rend, à la fin du processus, un roman qui intègre librement les personnages créés dans le cadre de l’atelier. Les controverses et les conflits entre les créateurs, qui ne sont pas inhabituels, se règlent dans et par la fiction. Les sagas islandaises, le Libro del Buen Amor du Moyen-Âge espagnol ou le Quichotte sont des productions de réseaux de personnages ; elles montrent que le dispositif de Timburbrou est tout sauf nouveau. Il est possible que les auteurs de ces œuvres n’aient pas eu conscience de participer à un réseau de personnages, mais c’est là un détail insignifiant ; leur production, cela est évident, en possède toutes les caractéristiques et c’est ce qui compte. Le Quichotte, l’exemple le plus célèbre d’un réseau de personnages, est devenu l’illustration canonique de l’intérêt que revêt la destruction de la notion de droit d’auteur ou, plutôt, l’absence de cette dernière. Sans l’incorporation de Saavedra, sans son Quichotte apocryphe, Cervantès n’aurait jamais écrit le deuxième volume de son roman, lequel roman ne serait jamais devenu le chef-d’œuvre qu’il est. La clé de la création du Quichotte tel que nous le connaissons ne réside pas dans le génie de Cervantès, mais dans la nécessité dans laquelle il s’est vu de répondre à l’usurpateur. C’est cette contrainte qui a fait d’un auteur brouillon qui écrivait un peu à la diable (selon le jugement de Pierre Menard) l’auteur du livre le plus célèbre de toute l’histoire de la littérature. Si Cervantès, au lieu de punir Saavedra par la fiction, l’avait traîné devant un tribunal pour s’être indûment approprié son travail, il aurait gagné une indemnisation, mais aurait perdu la gloire. On signalera, à titre subsidiaire, que Cervantès est, à nos yeux, un être composite, que les auteurs véritables du Quichotte se sont donné pour s’incarner collectivement en un seul être, ce qui est une façon déjà attestée de procéder dans certains réseaux.

Il n’y a pas de réseau de personnage sans ATTRACTEUR. Un attracteur est un objet, un lieu ou une situation que les participants doivent intégrer dans la vie de leurs personnages. Les attracteurs contraignent les personnages à interagir entre eux. Dans le cas du récit que l’on va lire, qui commence par une scène dans laquelle un agent de l’ICE (Immigration and Customs Enforcement) urine contre le mur d’une école, l’un des attracteurs fut l’article du New York Times dans lequel les faits étaient racontés et, surtout, la vidéo d’une caméra de surveillance qui les montraient. Un autre attracteur fut une fresque murale réalisée dans une école de Philadelphie qui contenait des codes QR. Un autre, ces champignons et, plus généralement, ces parasites qui s’emparent du réseau neuronal d’animaux pour les conduire à des comportements en apparence aberrants (le cas d’Ophiocordyceps unilateralis paraît avoir été central, de même que l’ouvrage Rise of the Zombie Bugs, de Mindy Weisberger).

On trouvera plus de détails sur le fonctionnement de l’atelier et sur les suites étonnantes qu’il eut dans les annexes qui accompagnent le récit ci-après.

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